EQUIPEMENT. L’armée de Terre va se doter d’ateliers d’impression 3D « projetables » pour réparer ses véhicules en opération

Posté le mardi 02 juillet 2024
EQUIPEMENT. L’armée de Terre va se doter d’ateliers d’impression 3D « projetables » pour réparer ses véhicules en opération

Menés respectivement en 2022 et en 2023, les exercices MEPAT [montée en puissance de l’armée de Terre] et Orion ont permis de souligner le « manque de profondeur logistique de l’armée de Terre », en particulier en matière de Maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres [MCO-T]. Tel est le constat dressé par le lieutenant-colonel Thomas Arnal dans les pages de la Revue militaire générale, qui reparaît sous l’égide du Commandement du combat futur, après deux années d’interruption.

« Le MCO-T fait face à trois défis : générer la force, la soutenir et la régénérer. Les retours d’expérience des exercices de montée en puissance et l’exercice Orion 2023 ont permis de constater l’ampleur de ces défis à l’aune de l’écart entre la facture logistique théorique d’une ‘division engagement majeur’ et l’état réel des stocks détenus », écrit l’officier.

 Cette situation est due à plusieurs facteurs. À cause, notamment, des contraintes budgétaires et au nom de « l’efficience », il a été considéré que posséder des stocks serait trop coûteux par rapport à des approvisionnements à flux tendu. Si cette logique a de moins en moins cours désormais, il n’en reste pas moins que des difficultés persistent…

« L’armée de Terre doit disposer au bon moment des bonnes ressources en quantité suffisante, ce qui implique anticipation et souplesse. Pour le MCO-T, les stratégies de soutien actuelles sont trop rigides pour remplir cet objectif [format, délais, volume financier alloué]. Les procédures dérogatoires et les contrats de soutien doivent donc gagner en souplesse. Les mécanismes actuels de mobilisation et de réquisition ne sont en outre pas assez performants », détaille le lieutenant-colonel Arnal.

En outre, et « sans entrer dans le détail de données classifiées », il apparaît que le « taux de réalisation des stocks nécessaires à une division pour une opération d’envergure sont faibles ». Or, poursuit-il, la « reconstitution de stocks pour le MCO-T représente un effort élevé sur les plans budgétaires et logistiques ».

Alors qu’un tel effort permettrait « d’augmenter la capacité de production de la BITD [Base industrielle et technologique de défense] et de gagner des délais sur la MEPAT en cas d’opération d’envergure », la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 n’en a pas tenu compte, « faute de financement ».

Qui plus est, avance le lieutenant-colonel Arnal, au-delà de l’aspect financier, les « délais de production semblent également incompatibles avec l’ambition opérationnelle fixée pour 2027 » [projection d’une division avec ses appuis et soutiens en trente jours].

Pour autant, en attendant que ces questions administratives, financières et industrielles soient réglées, l’armée de Terre, et plus particulièrement la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres [SIMMT] mise sur l’innovation technologique pour améliorer autant que possible le MCO-T.

« La SIMMT se tourne vers l’innovation technologique pour optimiser les activités de maintenance et limiter la dépendance à des stocks indisponibles immédiatement. La maintenance prédictive et l’impression 3D constituent des pistes prometteuses », souligne en effet le lieutenant-colonel Arnal.

Plusieurs projets ont d’ailleurs été lancés à cette fin, comme ICAR [Interface de connexion automatique pour le recueil de données technico-logistiques] et DEDAL [Déploiement d’écrans digitaux pour les activités de maintenance hors ligne]. Ou encore comme OPTIMUS et PRIME, dédiés à la fabrication additive.

Justement, à ce sujet, en marge de la dernière édition du salon de l’armement aéroterrestre EuroSatory, la Direction générale de l’armement [DGA] a annoncé que des « ateliers de fabrication additive projetables » allaient être prochainement mis en ְœuvre par les unités de l’armée de Terre déployées en Estonie et en Roumanie dans le cadre de l’Otan.

« Sous le pilotage opérationnel de la SIMMT, des conteneurs ‘Mobile Clinics‘, c’est-à-dire des ateliers de fabrication additive projetables, modulaires et évolutifs produits par Vistory, vont être envoyés aux forces françaises déployées dans l’est de l’Europe afin de fabriquer des pièces détachées. Arquus a participé au catalogue des pièces productibles », a en effet indiqué la DGA. Les modèles des pièces qui seront ainsi produites au plus près des troupes devront d’abord être validés par les bureaux d’études concernés, via une « chaîne numérique sécurisée ».

« Vistory a engagé il y a 6 mois la production d’une première version de ces Mobile Clinics. L’ensemble des collaborateurs de Vistory ont été mobilisés afin de répondre au plus vite à l’urgence opérationnelle d’un contexte complexe et ainsi permettre une livraison rapide. Cette première itération de ces unités de production, entièrement élaborées et assemblées sur fonds propres, embarquent des équipements de fabrication additive métal et polymère. Les différents matériels nécessaires au post-process ainsi qu’à la conception/reconception de pièces [scanner 3D HD] sont également compris », explique l’industriel sollicité par la DGA.

Pour cette dernière, le recours à une telle solution ne présente que des avantages, comme l’amélioration de la disponibilité opérationnelle « des systèmes de première ligne par son agilité et sa réactivité », la réduction « du nombre de convois de ravitaillement qui doivent traverser des territoires hostiles, et donc du risque sur les logisticiens », une moindre pression sur les chaînes d’approvisionnement et une grande diversité [matériaux, tailles, formes] permettant un soutien ‘juste à temps' ».

 

Laurent LAGNEAU
Opex360.com - Zone militaire
29/06/2024

Photo d'illustration

Source : Opex360.com - Zone militaire