Rebondissement en vue pour la relance d’une filière française de munitions de petit calibre

Rebondissement en vue pour la relance d’une filière française de munitions de petit calibre
Munitions

Un militaire de la STAT approvisione l’HK 416 F.

Depuis la fermeture de l’établissement de Giat Industries au Mans, à la fin des années 1990, la France ne dispose plus d’une filière industrielle souveraine en matière de munitions de petit calibre [5,56 mm, 7,62 mm et 9 mm]. Inflexible, la Direction générale de l’armement [DGA] s’est constamment opposée aux tentatives pour récupérer cette capacité en faisant valoir que cette dernière n’avait pas de valeur « stratégique » et qu’il n’y avait aucune difficulté d’approvisionnement auprès de fournisseurs étrangers, même s’il est arrivé que la qualité des cartouches laissait à désirer.

En 2017, Jean-Yves Le Drian, alors ministre de la Défense, passa outre les réticences de la DGA en signant un protocole d’accord avec TDA Armements [filiale de Thales], NobelSport [spécialiste des munitions pour la chasse et le tir sportif] et Manurhin afin de recréer une filière dédiée aux munitions de petit calibre. Peine perdue : ce projet fut officiellement abandonné après la publication de la Revue stratégique de défense, en octobre de cette année-là.

Seulement, les difficultés apparues lors de la pandémie de covid-19 et de la guerre en Ukraine ont changé la donne. Au point que, en décembre dernier, la DGA a fait aggiornamento.

« Sur les munitions de petit calibre, nous avons aujourd’hui une position qui a été réactualisée. Il y a quelques années, on disait : ‘circulez, il n’y a rien à voir, on n’a pas besoin d’une filière nationale’ […]. On s’est réinterrogé puisque le monde bouge. […] Et donc on se rend compte que, effectivement, le besoin des armées, c’est d’être approvisionnées, en priorité, en munitions de 5,56 mm », a admis Emmanuel Chiva, le Délégué général pour l’armement.

Et d’ajouter : « On a fait une étude qui a confirmé la possibilité que nous pouvons exiger la localisation d’une usine en France, au titre des intérêts essentiels de sécurité et nous avons des discussions en cours », en particulier avec la Belgique.

En effet, quelques mois plus tôt, la France et la Belgique avaient signé une lettre d’intention en vue d’établir un partenariat dans le domaine des munitions de petit calibre.

« L’objectif est de la recréer en s’appuyant sur les compétences belges. Ce nouveau volet doit comprendre la création d’une ligne d’assemblage de munitions en France et l’achat de munitions directement auprès de l’industrie belge. Les industriels travaillent à ce stade sur les questions de financement de l’investissement, le projet devant démarrer dans les prochains mois », avait alors expliqué le ministère des Armées.

Aussi, candidat à la reprise de l’armurier Verney-Carron après être entré en négociations « exclusives » pour mettre la main sur le français Sofisport [via ses filiales Nobel Sport, Cheddite, Maxam, Sofiam, etc.], le belge FN Browning était supposé jouer un rôle central dans cette affaire.

Du moins le croyait-on… Car, selon La Lettre, le ministère des Armées a changé d’approche et aurait l’intention de lancer un appel d’offres pour relocaliser une filière dédiée aux munitions de petit calibre.

Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, « avait validé le principe d’une relance de la filière nationale de petites munitions. Mais elle se fera via un appel d’offres ouvert, alors que le belge FN Browning avait été fléché vers ce programme en mai, dans le cadre d’un accord entre Paris et Bruxelles », avance en effet La Lettre. Si elle laissera une chance à d’autres industriels européens, comme Beretta, cette décision pourrait retarder l’ouverture d’une unité de production en France.

Reste à voir comment la Défense belge prendra ce revirement, sachant que, en 2022, sa Direction générale des ressources matérielles [DGRM] avait évoqué une éventuelle coopération avec la France, les Pays-Bas et le Luxembourg dans ce domaine, l’objectif étant d’avoir en commun des armes et des munitions identiques afin de sécuriser les stocks.

Laurent LAGNEAU

Source : Opex360
18/03/2025