Je rebondis sur le dernier billet d’humeur pour vous faire partager mon opinion personnelle :
Avec Trump, il faut séparer la forme et le fond.
La forme est exécrable et délibérément scandaleuse. Sa brutalité, son manque d’expérience et d’éducation ajoutée à son adoration du show oblitèrent le message.
Il me semble pourtant que le fond n’est pas si éloigné de la politique constante des USA.
Les USA n’ont pas été des alliés spontanés de l’Europe démocratique dans les deux guerres mondiales. Leurs interventions ont été soupesées en termes économiques. On se souviendra aussi de 1920, quand le Président des USA, Woodrow Wilson, qualifié de fou, a brisé l’Alliance atlantique que la France avait promue et réalisée entre 1918 et 1920, puis a vu échouer, à son détriment.
Voir à ce sujet cet article de Patrick Weil dans Le Grand Continent
Puis il y a eu Suez en 1956, quand les Américains et les Soviétiques – conjointement, même si les motivations étaient différentes voire opposées – ont stoppé les Français, les Britanniques (et les Israéliens). Dans un contexte certes bien différent, puisque nous intervenions dans un pays souverain (pour la légitime raison de la nationalisation du Canal, je m’empresse de le préciser) mais c’est un petit clin d’œil de l’histoire…
Par ailleurs , la politique constante de la CIA , bras armé de l’action internationale américaine, ne s’est jamais embarrassée du respect des valeurs démocratiques.
Ne parlons pas des mensonges présidentiels sur l’Irak.
L’idée de rapprocher la Russie du bloc « blanc » face aux masses indiennes, chinoises et africaines n’est pas stupide.
L’idée d’arrêter un massacre n’est pas stupide.
L’idée de rattraper la gigantesque erreur occidentale post 1991 quand la Russie tendait la main et voulait s’atteler à l’Otan n’est pas stupide.
Mais quelle ignorance de la dimension affective. L’humiliation et l’irrespect créent des brèches infranchissables.
Cependant, il faut remercier Trump de rappeler à la masse naïve européenne que nul ne peut déléguer sa défense et que l’amitié entre les peuples est un concept faible.
Plus on attend pour arrêter ce massacre, plus ce sera long et difficile de résorber la haine accumulée. Le grand défi aujourd’hui est bien de construire une paix durable sans laisser une frustration chez les uns ou les autres qui fomenterait une revanche dans dix ou vingt ans, comme en 1919.
Il faut surtout la vouloir cette Paix, fut-ce en ravalant un peu d’orgueil.
Vice-amiral d’escadre (2S) Xavier Païtard
Vice-président de l’ASAF
07/03/2025
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