« Les cordonniers sont toujours les plus mal chaussés », dit le proverbe. Ainsi en est-il de la Bundeswehr [forces fédérales allemandes] en matière de défense aérienne. Du moins était-ce encore vrai jusqu’à ce 4 septembre, avec la mise en service de son premier système IRIS-T SLM, que l’armée ukrainienne utilise depuis maintenant près de deux ans.
Jusqu’au début de la guerre en Ukraine, le ministère allemand de la Défense n’avait pas témoigné un vif intérêt pour ce système mis au point par Diehl Defence… Contrairement à l’Égypte, qui en commanda sept exemplaires en 2018 [puis seize autres en 2021], et à la Suède, qui l’utilise depuis plus de cinq ans [sous l’appellation RBS 98].
Seulement, les retours d’expérience [RETEX] d’Ukraine finirent par convaincre Berlin d’en acquérir, d’autant plus que les capacités de la Bundeswehr en matière de défense aérienne furent considérablement amoindries après la Guerre froide. En outre, Étant donné que l’Allemagne est susceptible de devenir essentielle pour la logistique de l’Otan en cas de conflit, il était devenu urgent d’y remédier.
D’où, d’ailleurs, le projet de défense antimissile multicouches européenne [ESSI – European Sky Shield Initiative] lancé par Berlin dans le cadre de l’Otan afin de mutualiser les achats de systèmes de défense aérienne entre les pays participants. Trois ont été retenus, à savoir l’Arrow 3 israélien, le Patriot américain et… l’IRIS-T SLM, dont six exemplaires ont été commandés par le ministère allemand de la Défense en juin 2023.
Le premier est donc entré en service, au sein du 61e groupe de défense aérienne [Flugabwehrraketengruppe 61 – FlaRakGrp 61], basé à Todendorf [Schleswig-Holstein].
« Ici à Todendorf, un nouveau chapitre de la défense aérienne européenne se dessine aujourd’hui », a commenté Olaf Scholz, le chancelier allemand, lors d’une cérémonie marquant officiellement la mise en service de l’IRIS-T SLM au sein de la Bundeswehr. « Nous comblons une lacune importante en matière de défense aérienne », s’est félicité Boris Pistorius, son ministre de la Défense. Mais ce n’est qu’un premier pas, dans l’attente de la livraison d’un système Arrow 3 et de huit nouvelles batteries Patriot PAC-3, en partie pour remplacer celles fournies à Kiev.
En tout cas, selon M. Scholz, les quatre systèmes livrés à l’Ukraine auraient permis d’abattre plus de 250 cibles aériennes [missiles de croisière et drones]. Le taux de réussite de l’IRIS-T SLM serait « d’au moins 95 % », a-t-il précisé.
Pour rappel, l’IRIS-T-SLM est capable d’intercepter un aéronef jusqu’à 40 km de distance et à une altitude de 20 km. Une unité de tir se compose d’un poste de commandement, d’un radar [d’une portée de 250 km] et de plusieurs lanceurs. Chaque exemplaire coûte 140 millions d’euros.
LAURENT LAGNEAU
04/09/2024
Source : Opex360