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Police du ciel : Les interventions de l’armée de l’Air et de l’Espace ont augmenté de plus de 170% en 2023

AAEPolice du ciel : Les interventions de l’armée de l’Air et de l’Espace ont augmenté de plus de 170% en 2023

Au fil du temps, les bilans annuels du Commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes [CDAOA] sont de plus en plus succinctse réduisent comme peau de chagrin. Cela ne veut pas dire que l’activité opérationnelle de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] est moindre, bien au contraire… Mais que ce type de document livre désormais beaucoup moins de détails et d’informations que par le passé.

Par exemple, depuis 2022, le nombre de munitions tirées lors des opérations extérieures en cours n’est plus communiqué, très probablement pour ne pas donner d’indications sur l’état des stocks de bombes et de missiles. En outre, les missions [chasse, transport, ravitaillement en vol, renseignement, etc.] sur chacun des théâtres extérieurs ne sont plus détaillées. Enfin, les témoignages et les commentaires de responsables militaires [et civils] qui accompagnaient ces statistiques n’ont plus droit de cité.

Cependant, le bilan 2023 que vient de publier le CDAOA livre toutefois quelques informations intéressantes. Ainsi, l’an passé, l’AAE a effectué plus de 900 sorties au titre de la Posture permanente de la sûreté aérienne [PPS-A], dont 550 ont été assurées par des hélicoptères Fennec. Cela représente une hausse de 172 % par rapport à l’année précédente et une moyenne de 70 missions par
mois.

Pour rappel, la PPS-A vise à assurer la protection de l’espace aérien national, sous la responsabilité du Premier ministre. Relevant du CDAOA, ce dispositif, qui mobilise 400 aviateurs, est actif 24h/24 et 7J/7. Environ 12’000 aéronefs sont suivis quotidiennement par 70 radars civils et miliaires, reliés aux trois Centres de détection et de contrôle [CDC] de l’AAE. L’image de la situation aérienne est élaborée par le Centre national des opérations aériennes [CNOA], à qui il revient d’identifier chaque appareil et, le cas échéant, d’ordonner une intervention.

Pour l’exercice 2022, le CDAOA avait fait état de 331 sorties au titre de la PPS-A, dont 190 pour l’aviation de chasse et 141 pour les hélicoptères Fennec.

Ces chiffres sont en augmentation constante depuis quelques années [même lors de la pandémie de covid-19, pourtant marquée par une chute du trafic aérien]. Ainsi, en 2016, il avait été fait état de 91 « décollages sur alerte chasse » et de 41 « décollages sur alerte hélicoptère ». Évidemment, une telle activité n’est pas sans conséquence sur le potentiel des aéronefs mobilisés… d’autant plus que les Fennec ne sont maintenant plus tout jeunes.

Ces décollages sur alerte sont généralement motivés par des pertes ou des absences de contact radio, des pannes de transpondeur, de problèmes de trajectoires, etc. Ils peuvent être ordonnés pour des « confirmations d’identité » ou pour porter assistance à un aéronef en difficulté.

Parmi les exemples d’intervention qu’il a cités, le CDAOA a pris celui de l’interception par un Rafale et un Fennec d’un « aéronef civil étranger ayant pénétré l’espace aérien français sans plan de vol » avant de commettre de « nombreuses infractions ».

En outre, le bilan annuel du CDAOA rappelle que 14 dispositifs particuliers de sûreté aérienne [DPSA] ont été mis en place l’an passé, notamment lors du salon du Bourget, de la visite du pape François à Marseille et de la coupe du monde de rugby. Plus de 300 sorties aériennes ont été effectuées à ce titre en 2023.

À noter par ailleurs que le CDAOA ne précise plus le nombre de violations d’espaces aériens interdits.

Dans le même temps, le nombre de sorties pour « entraînement » dans le cadre de la PPS-A a fortement diminué : 600 ont été réalisées, contre 1000 un an plus tôt.

Si l’activité de l’AAE pour la PPS-A a été importante l’an passé, ce n’a pas le cas pour les opérations menées sur le flanc oriental de l’Otan, lesquelles consistent à mener des missions de type « Air Shielding » et à assurer la protection de l’espace aérien des pays baltes [Baltic Air Policing].

Selon le CDAOA, 1200 sorties, pour un total de 6300 heures de vols, avaient ainsi été effectuées en 2022, contre « seulement » 700 en 2023, avec un volume d’heures de vol divisé par deux. Et cela malgré le déploiement de quatre Rafale en Lituanie entre décembre 2022 à mars 2023. Selon le ministère des Armées, ces appareils avaient assuré une « quinzaine de décollages sur alertes réelles » [Alpha Scramble] du Combined Air Operations Center [CAOC] pour intercepter et identifier « plus de 25 aéronefs ».

S’agissant des autres engagements extérieurs, l’activité de l’AAE a sensiblement diminué au Sahel, ce qui n’est pas une surprise, après le retrait du Mali. En 2022, elle avait effectué 5072 sorties [dont 1109 pour des missions « chasse », 1235 pour le renseignement et 2153 pour le transport]. Lors de l’exercice suivant, ce chiffre est « tombé » à 4200, le CDAOA n’ayant pas précisé la nature des missions réalisées.

En revanche, l’activité a été plus importante au Levant, les appareils de l’AAE engagés dans l’opération Chammal [dont dix Rafale basés en Jordanie et aux Émirats arabes unis] ayant été sollicités pour 900 sorties, contre 807 en 2022.

 

Laurent LAGNEAU
Opex360.com – Zone militaire