Le Japon défie la Chine

Le Japon défie la Chine

destroyer JaponnaisLe Japon défie la Chine en envoyant un navire militaire dans le détroit de Taïwan pour la première fois

Le 23 septembre, il a été rapporté que le commandant du « destroyer » japonais JS Suzutsuki avait été relevé de ses fonctions pour avoir navigué dans les eaux territoriales chinoises pendant une vingtaine de minutes, en juillet dernier. Et cela malgré les avertissements adressés par l’Armée populaire de libération [APL], qui avait instauré une zone interdite à la navigation pour un exercice prévoyant des tirs réels.

L’enquête menée à la suite de cet incident « a également révélé des failles dans la transmission des informations entre les autres membres de l’équipage en service lorsque le JS Suzutsuki est entré dans les eaux chinoises », a par ailleurs révélé l’agence de presse Kyodo News, en se fiant à des confidences faites par des sources diplomatiques.

 

Évidemment, la Chine ne manqua pas de dénoncer cette intrusion d’un « destroyer » japonais à moins de 12 nautiques de ses côtes… alors que ses navires ne se privent pas d’en faire autant dans les eaux territoriales nippones, notamment dans les environs des îles Senkaku, dont elle revendique la souveraineté. Qui plus est, les incursions de navires hydrographiques chinois de type 636 sont aussi monnaie courante. Cela est arrivé au moins à dix reprises depuis 2021.

Était-ce une réponse à l’incident provoqué par le JS Suzutsuki ? Toujours est-il que, le 26 août, un avion espion chinois de type Y-9DZ, spécialisé dans le recueil du renseignement d’origine électromagnétique [ROEM], a violé l’espace aérien japonais au large des îles Dango [préfecture de Nagasaki]. Ce qui aura été une première.

 

Puis, le 17 septembre, de façon tout aussi inédite, le porte-avions chinois CNS Liaoning a navigué dans la zone contiguë aux eaux territoriales japonaises, entre les îles Yonaguni et Iriomote [préfecture d’Okinawa]. Il était accompagné par les « destroyers » de type 052D « Chengdu » et « Huainan ».

Pour rappel, une zone contiguë est adjacente aux eaux territoriales et s’étend jusqu’à une distance maximale de 24 nautiques [44,4 km], calculée à partir des lignes de base. Le pays côtier est fondé à y exercer des contrôles et réprimer des infractions à sa législation.

« Après la récente violation de notre espace aérien par un avion militaire chinois et des mouvements de navires de guerre chinois et d’autres navires autour du Japon, cet incident est totalement inacceptable du point de vue de la sécurité nationale et régionale », a ensuite réagi Hiroshi Moriya, le porte-parole du gouvernement nippon. En réponse, Pékin a fait valoir que ses activités étaient « conformes au droit chinois et au droit international ».

Aussi, le Japon a-t-il rendu la pareille. Le 25 septembre, selon le quotidien Yomiuri, le « destroyer » JS Sazanami a navigué pendant plus de 10 heures dans le détroit de Taïwan. Jamais un navire japonais ne s’y était aventuré jusqu’alors.

Le JS Sazanami y a rejoint le « destroyer » australien HMAS Sydney et le pétrolier-ravitailleur néo-zélandais HMNZS Aotearoa, avec lesquels il doit effectuer un exercice en mer de Chine méridionale. Et cela, sous l’étroite surveillance d’au moins cinq navires de la marine chinoise.

Le droit maritime international autorise le transit « inoffensif » de navires militaires dans les détroits. Mais Pékin estime que celui de Taïwan constitue un continuum entre ses eaux territoriales, sa zone contiguë et sa zone économique exclusive [ZEE]. Et que, par conséquent, sa souveraineté s’y exerce.

Aussi, l’envoi du JS Sazanami dans le détroit de Taïwan marque une rupture de la politique japonaise qui, jusqu’à présent veillait à ne pas défier directement la Chine.

Celle-ci a d’ailleurs critiqué le transit du navire japonais, en affirmant qu’il allait « à l’encontre d’une compréhension mutuelle du principe d’une seule Chine ».

La « partie chinoise est très vigilante quant aux intentions politiques du Japon et lui a fait part de sa ferme protestation », a déclaré Lin Jian, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, ce 26 septembre. Et d’insister : « Nous exhortons la partie japonaise à honorer son engagement sur la question de Taïwan, à faire preuve de prudence dans ses paroles et ses actes et à s’abstenir de faire obstruction aux relations sino-japonaises et à la paix dans le détroit de Taiwan ».

LAURENT LAGNEAU

Source : Opex360
26/09/2024